manda en mariage. Notre confrère avait 43 ans, et des revenus assez médiocres ; mais telle
était la vivacité de sa passion, qu’il ne stipula
rien par écrit avec ses futurs parents sur
la dot de sa femme ; qu’il n’y eut qu’un contrat
verbal.
Nous voilà bien loin du caractère calculateur, glacial qu’on a prêté à Condorcet. Eh ! c’est que ce caractère supposé, dont j’aurai l’occasion de parler plus d’une fois, avait été modelé sur celui de divers académiciens pour qui notre confrère professait une amitié, une admiration sans limites, et avec lesquels on supposa à tort qu’il sympathisait de toute manière, et sur tous les sujets.
Dans ce temps-là, sauf de rares exceptions, les savants, les mathématiciens, surtout, étaient regardés dans le monde comme des êtres d’une nature à part. On aurait voulu leur interdire le concert, le bal, le spectacle, comme à des ecclésiastiques. Un géomètre qui se mariait semblait enfreindre un principe de droit. Le célibat paraissait la condition obligée de quiconque s’adonnait aux sublimes théories de l’analyse. Le tort était-il tout entier du côté du public ?