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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/194

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CLXXX
REMARQUES


mettre par sa présence la femme qu’il appelait sa seconde mère, celle qui lui avait donné les plus admirables preuves de dévouement. M. de Lamartine l’explique, suivant moi, par des causes bien puériles. Voici le passage des Girondins qui a trait à la fuite de Condorcet :

« Condorcet aurait été heureux et sauvé, s’il eût su attendre ; mais l’impatience de son imagination ardente l’usait, et le perdit. Il fut saisi au retour du printemps, et à la réverbération du soleil d’avril contre les murs de sa chambre, d’un tel besoin de liberté et de mouvement, d’une telle passion de revoir la nature et le ciel, que Mme Vernet fut obligée de le surveiller comme un véritable prisonnier, de peur qu’il n’échappât à sa bienveillante surveillance. Il ne parlait que du bonheur de parcourir les champs, de s’asseoir à l’ombre d’un arbre, d’écouter le chant des oiseaux, le bruit des feuilles, la fuite de l’eau. La première verdure des arbres du Luxembourg, qu’il entrevit de sa fenêtre, porta cette soif d’air et de mouvement jusqu’au délire. »

Voyons ce qu’il y a de vrai dans ces assertions. Si Condorcet était dominé par le désir de s’asseoir à l’ombre d’un arbre et d’entendre le bruit des feuilles, il pouvait se donner cette satisfaction sans quitter la maison de Mme Vernet, car il y avait dans la cour cinq gros tilleuls.