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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/217

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ENTRE VOLTAIRE ET CONDORCET.


pas, mais ses protecteurs rougiront ; et si, parmi les ennemis delà philosophie, il y a quelques honnêtes gens qui la craignent, comme des yeux trop délicats craignent la lumière, ils n’oseront plus rester dans un parti qui n’a pour chefs comme pour protecteurs que des hommes chargés du mépris ou de la haine publique.

Le bruit s’est répandu, il y a quelques semaines, que M. de Lalande avait dit qu’il n’était pas absolument impossible qu’une comète vînt choquer la terre. Aussitôt la frayeur s’est emparée des esprits. Les femmes de la cour et celles de la halle ont couru à confesse, et il s’est fait une grande consommation de pains azymes ; ce qui est un grand bien, car les marchands de cette espèce de denrée se plaignent que ce commerce tombe tous les jours. Il n’y en a pourtant point de meilleur selon tous les principes de l’économie politique, puisqu’on ne peut nier que la matière première ne soit bien peu de chose, et que la main-d’œuvre n’en fasse tout le mérite.

Avez-vous reçu, mon cher et illustre maître, une lettre où je vous mandais que j’avais été élu secrétaire de l’Académie des sciences en survivance ? Quand on n’est pas assez heureux pour demeurer au mont Krapack, et pouvoir dire de là tout ce qu’on pense, et qu’on n’a pas reçu une voix assez forte pour se faire entendre du fond de sa retraite aux tyrans de toutes les robes, et les faire trembler au milieu de leurs esclaves, alors on peut regarder une place de cette nature comme un moyen de faire sourdement le peu de bien que l’on peut faire.