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ENTRE VOLTAIRE ET CONDORCET.


lu dans le trente-deuxième recueil des prétendues Lettres édifiantes et curieuses, la lettre d’un jésuite imbécile nommé Benoît à un fripon de jésuite nommé Dugad ? Il y est dit en propres mots qu’un ministre d’État accusant un mandarin d’être chrétien, l’empereur Kien-long lui dit : « La province est-elle mécontente de lui ? — Non. — Rend-il la justice avec impartialité ? — Oui. — A-t-il manqué à quelque devoir de son état ? — Non. — Est-il bon père de famille ? — Oui. — Eh bien donc, pourquoi l’inquiéter pour une bagatelle ?

Si vous voyez M. Turgot, faites-lui ce conte. Je vous envoie la copie d’une requéte que j’ai barbouillée pour tous les ministres. Il n’y a que le roi à qui je n’en ai pas envoyé. Je souhaite passionnément que cette requête soit présentée au conseil de commerce, dans lequel M. Turgot pourrait avoir une voix prépondérante. J’ai du moins la consolation de voir que, malgré les grands hommes, tels que Fréron, Clément et Sabotier, Ferney est devenu, depuis que vous ne l’avez vu, un lieu assez considérable, qui n’est pas indigne de l’attention du ministère. Il y a non-seulement d’assez grandes maisons de pierre de taille pour les manufactures, mais des maisons de plaisance très-jolies qui orneraient Saint-Cloud et Meudon : tout cela va rentrer dans le néant d’où je l’ai tiré, si le ministère nous abandonne. Je suis peut-être le seul fondateur de manufacture qui n’ait pas demandé de l’argent au gouvernement. Je ne lui demande que d’écouter son propre intérêt. Je vous en fais juges, vous et M. Bertrand.