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ENTRE VOLTAIRE ET CONDORCET.



28. A CONDORCET.


23 décembre 1774.


Vous êtes deux belles âmes, vous et l’autre Bertrand. Je reçois et je lis avec trausport votre lettre du 13. Vous viendrez certainement à bout de l’affaire que vous entreprenez avec tant de générosité [1]. Vous montrerez enfin aux hommes à quoi servent la justesse de l’esprit et la bonté du cœur.

Je vous ai déjà dit que je pense absolument comme vous ; je ne veux point de grâce, je veux justice complète. Nous n’avons qu’un seul obstacle, mais il est grand. Un enfant de quatorze ou quinze ans, imbécile et timide [2], a chargé cruellement celui pour qui nous nous intéressons. Il faut écarter ce pauvre garçon, qui serait très-dangereux, et c’est à quoi je travaille, quoique je sois à cent cinquante lieues de lui. Il serait incapable de répondre d’une manière satisfaisante s’il fallait qu’il comparût encore, et toute notre peine serait perdue.

Il est impossible et il serait très-dangereux de commencer par celui qui est mort [3]. Sa famille n’entreprendra certainement pas une telle affaire. Il faut commencer par purger la contumace du vivant [4] parlement même. Il n’a contre lui que les aveux du

  1. La révision du procès de La Barre. Voyez la lettre précédente.
  2. Moinel. Voyez l’extrait des dépositions joint à la lettre précédente.
  3. La Barre.
  4. D’Étallonde.