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DIALOGUE ENTRE DIOGÈNE ET ARISTIPPE.

pourvu qu’il aime la gloire et qu’il haïsse la superstition.

DIOGÈNE.

Mais tes yeux ne sont-ils pas fatigués du spectacle de l’esclavage, et n’es-tu pas dégoûté de vivre avec des esclaves ?

ARISTIPPE.

Oui, c’est pour cela que je suis venu dans la Grèce voir des hommes libres, et causer avec Diogène.

DIOGÈNE.

Aristippe, si tu savais vivre comme moi, tu n’irais pas dans le palais des tyrans.

ARISTIPPE.

Diogène, si tu savais vivre avec les hommes, tu ne coucherais pas dans un tonneau. Pardonne-moi ma facilité et mes plaisirs en faveur de ma douceur et de ma gaieté. Ton courage et ta sublime abstinence me font oublier ta dureté et ton orgueil.

DIOGÈNE.

Aristippe serait-il capable de partager le pain de Diogène, et de boire avec lui de l’eau dans le creux de sa main ?

ARISTIPPE.

Oui ; malgré la gourmandise qu’on me reproche, j’ai plus de plaisir à entendre un bon mot que de boire du vin dans une coupe d’or, le meilleur de la Sicile.