reur traînant à sa suite la honte, la misère et le désespoir.
Le tableau de Béverley, tracé d’après des
événements réels, trop communs mais trop oubliés,
est adouci par la peinture d’une femme tendre et
sensible qui souffre ses malheurs avec ce courage
résigné, présent que la nature a fait à son sexe, et
qui ne songe, dans la ruine de sa fortune, qu’à la
douleur qu’éprouve celui qui l’a causée. Eh ! combien
cet heureux contraste n’a-t-il pas même servi à l’effet
théâtral de la pièce, et redoublé la terreur dans l’âme
de ceux à qui cette effrayante leçon est adressée ! Si
les remords d’entraîner avec nous des êtres innocents
et chers, qui, malheureux par nous seuls, ne
pleurent que sur nous, n’est pas la plus amère de
toutes les douleurs pour ceux que leurs crimes ont
déjà précipités dans l’abîme, du moins il n’en est point
dont l’idée puisse porter un trouble plus salutaire
dans le cœur de ceux en qui les passions n’ont pas
étouffé tous les sentiments de la nature. Cette menace
peut encore arrêter le joueur effréné, qui s’est
familiarisé avec les idées du désespoir et de la mort ;
elle peut effrayer celui qui ne sait plus craindre pour
lui-même. Nous devons donc à M. Saurin un drame
intéressant et moral, une pièce qui n’est point une
tragédie mise sous des noms vulgaires, un ouvrage
qui n’est pas né de l’impuissance de faire parler avec
noblesse les héros ou les grands hommes.
En lisant les épîtres morales de M. Saurin, on regrette qu’il en ait fait un si petit nombre : elles sont distinguées de la foule des ouvrages de ce genre, devenu si commun et si difficile, par une philoso-