à la nécessité d’avoir un état, le moment du calme
avait été pour lui le moment du bonheur. Enfin,
quoiqu’il se fût uni dans un âge avancé à une femme
beaucoup plus jeune, il répétait souvent,
qu’il n’avait été heureux que depuis son mariage. Et si l’on songe combien d’hommes, en se mariant au même âge, n’ont fait que le malheur de deux personnes, et que
toute espèce d’inégalité dans un lien si intime est
un obstacle presque insurmontable à la félicité commune
de ceux qu’il unit, on sentira que ce mot est
peut-être le plus bel éloge qu’on puisse faire de M. Saurin, et de l’épouse aimable et sensible, dont la tendresse consolante avait su, pour me servir de sa
propre expression, le rattacher à la vie.
Son extérieur annonçait un caractère sérieux et même austère ; cependant il était naturellement gai, non-seulement de cette gaieté paisible et philosophique, qui ne permet que le sourire ; mais de cette gaieté vive et de premier mouvement, qui vient de l’âme et non de la réflexion. Cette nuance de son caractère n’était connue que du petit nombre de ses amis. Comme tous les hommes qui, nés avec un esprit réfléchi et une âme sensible, sont dominés par une douce mélancolie, il avait besoin, pour s’abandonner à sa gaieté, de goûter ce sentiment de confiance, de paix et de bonheur, qu’on n’éprouve que dans la société intime.
Cette raison saine, cet esprit sage et juste, qui caractérisaient tous les ouvrages de M. Saurin, l’ont constamment dirigé dans la conduite de sa vie. Il eut toujours cette dignité simple et modeste qui