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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/708

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RÉCIT DE CE QUI S'EST PASSÉ


moire, Messieurs ne se rendraient pas juges dans leur propre cause, comme plusieurs paraissaient le croire. En effet, dit-il, si nous y sommes attaqués, c'est comme magistrats. Nous sommes impassibles ; donc, sans scrupule, nous pouvons venger nos injures. L'effet terrible qu'a produit le mémoire annoncé, ajouta-t-il, doit excuser la sévérité de la cour. Lorsqu'on ne nous fermait point la porte, on nous recevait avec froideur, on osait nous interroger. Enfin ce magistrat conclut à ce que le mémoire fût brûlé par la main du bourreau, et qu’on ordonnât une information contre l’auteur. L’un de Messieurs, M. de Barillon, répliqua qu’il ne pouvait être de cet avis, par la raison même rapportée par M. le président ; qu'après un pareil arrêt, il craignait de trouver encore moins de portes ouvertes, des mines plus froides, et des questions plus embarrassantes. Un autre fit observer qu’en se rappelant les époques, on trouverait que l'effet dont se plaignait M. le président, avait pour cause, non le mémoire, mais la dénonciation du mémoire; que c'était là ce qui avait indigné le public, qui se plait aussi à juger, qui ne pardonne pas plus qu'un autre tribunal, et qui n’aime pas qu’on veuille restreindre sa juridiction. Cependant l'avis de M. d’Ormesson a passé à la pluralité de cinquante-cinq voix contre vingt-neuf ; hommage que le parlement devait sans doute à la patience vraiment chrétienne avec laquelle ce magistrat avait laissé torturer et exécuter le chevalier de La Barre, son neveu à la mode de Bretagne, de son nom, sans se permettre la moindre démarche publique, ni pour