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FRAGMENT DE JUSTIFICATION[1].


(Juillet 1793.)


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Comme j’ignore si je survivrai à la crise actuelle, je crois devoir à ma femme, à ma fille, à mes amis, qui pourraient être victimes des calomnies répandues contre ma mémoire, une exposition simple de mes principes et de ma conduite pendant la révolution. Elle peut avoir un autre avantage, celui d’empêcher que l’exemple des injustices que j’ai essuyées, ne décourage quelques amis de la liberté ; celui d’une justice même tardive peut les aider à s’élever comme moi au-dessus de l’opinion des contemporains.

Persuadé depuis longtemps que l’espèce humaine est indéfiniment perfectible, et que ce perfectionnement, suite nécessaire de l’état actuel des connaissances et des sociétés, ne peut être arrêté que par des révolutions physiques dans le globe, je regardais le soin de hâter ces progrès comme une des plus douces occupations, comme un des premiers devoirs de l’homme qui a fortifié sa raison par l’étude et par la méditation.

Je croyais qu’une constitution, où toutes les lois, préparées par un petit nombre d’hommes choisis par tous les citoyens, seraient présentées ensuite à leur acceptation, où l’action du gouvernement, réduite à une grande simplicité, se bornerait à quel-

  1. Nous imprimons ce fragment sur le brouillon autographe ; c’est un premier jet qui n’a jamais été revu. Voyez la note finale, p. 605.