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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/814

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CONSEILS DE CONDORCET


richesses, tu les estimeras moins : tu seras plus à l’abri des malheurs auxquels on s’expose pour en acquérir ou par la crainte de les perdre.

Choisis un genre de travail où la main ne soit pas occupée seule, où l’esprit s’exerce sans trop de fatigue ; un travail qui dédommage de ce qu’il coûte parle plaisir qu’il procure : sans cela, le dégoût qu’il te causerait, si jamais il te devenait nécessaire, te le rendrait presque aussi insupportable que la dépendance. S’il ne t’en affranchissait que pour te livrer à l’ennui, peut-être n’aurais-tu pas le courage d’embrasser une ressource qui, pour prix de l’indépendance, ne t’offrirait que le malheur.


II.


Pour les personnes dont le travail nécessaire ne remplit pas tous les moments, et dont l’esprit a quelque activité, le besoin d’être réveillées par des sensations ou des idées nouvelles devient un des plus impérieux. Si tu ne peux exister seule, si tu as besoin des autres pour échapper à l’ennui, tu te trouveras nécessairement soumise à leurs goûts, à leurs volontés, au hasard, qui peut éloigner de toi ces moyens de remplir le vide de ton temps, puisqu’ils ne dépendent pas de toi-même.

Ils s’épuisent aisément, semblables aux joujoux de ton enfance, qui perdaient au bout de quelques jours le pouvoir de t’amuser.

Bientôt, à force d’en changer, et par l’habitude seule de les voir se succéder, on n’en trouve plus