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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/140

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tain que dans l’état actuel de la civilisation des nations européennes, il n’y aura jamais qu’un très-petit nombre de citoyens qui puissent s’occuper des affaires publiques. On n’arracherait pas les femmes à leur ménage plus que l’on n’arrache les laboureurs à leurs charrues, les artisans à leurs ateliers. Dans les classes plus riches nous ne voyons nulle part les femmes se livrer aux soins domestiques d’une manière assez continue pour craindre de les en distraire, et une occupation sérieuse les en détournerait beaucoup moins que les goûts futiles auxquels l’oisiveté et la mauvaise éducation les condamnent. La cause principale de cette crainte est l’idée que tout homme admis à jouir des droits de cité ne pense plus qu’à gouverner ; ce qui peut être vrai jusqu’à un certain point dans le moment où une constitution s’établit, mais ce mouvement ne saurait être durable. Ainsi il ne faut pas croire que parce que les femmes pourraient être membres des assemblées nationales elles abandonneraient sur-le-champ leurs enfants, leur ménage, leur aiguille. Elles n’en seraient que plus propres à élever leurs enfants, à former des hommes. Ils est naturel que la femme allaite ses enfants, qu’elle soigne leurs premières années ; attachée à sa maison par ces soins, plus faible que l’homme il est naturel encore qu’elle mène une vie plus retirée, plus domestique. Les femmes seraient donc dans la même classe que les hommes, obligés par leur état à des soins de quelques heures. Ce peut être un motif de ne pas les préférer dans les élections, mais ce ne peut être le fondement d’une exclusion