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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/139

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Nous répondrons d’abord que cette influence, comme toute autre, est bien plus à redouter dans le secret que dans une discussion publique ; que celle qui peut être particulière aux femmes y perdrait d’autant plus, que, si elle s’étend au-delà d’un seul individu, elle ne peut être durable dès qu’elle est connue. D’ailleurs comme jusqu’ici les femmes n’ont été admises dans aucun pays à une égalité absolue, comme leur empire n’en a pas moins existé par-tout, et que plus les femmes ont été avilies par les lois plus il a été dangereux, il ne paraît pas qu’on doive avoir beaucoup de confiance à ce remède. N’est-il pas vraisemblable au contraire que cet empire diminuerait si les femmes avoient moins d’intérêt à le conserver, s’il cessait d’être pour elle le seul moyen de se défendre et d’échapper à l’oppression.

Si la politesse ne permet pas à la plupart des hommes de soutenir leur opinion contre une femme dans la société, cette politesse tient beaucoup à l’orgueil ; on cède une victoire sans conséquence ; la défaite n’humilie point parce qu’on la regarde comme volontaire. Croit-on sérieusement qu’il en fût de même dans une discussion publique sur un objet important  ? La politesse empêche-t-elle de plaider contre une femme ?

Mais, dira-t-on, ce changement serait contraire à l’utilité générale, parce qu’il écarterait les femmes des soins que la nature semble leur avoir réservés ?

Cette objection ne me parait pas bien fondée. Quelque constitution que l’on établisse, il est cer-