Aller au contenu

Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/381

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
369
de la circulation des subsistances.

publique, on s’expose à écarter les hommes désintéressés, honnêtes, amis de la patrie, d’un commerce nécessaire, qu’il serait à désirer de ne voir confié qu’à des mains pures ; on produit encore réellement le mal dont on se plaint.

Ces inquiétudes, ces faux jugements, en diminuant, en suspendant pour un temps, en éloignant, en troublant les secours qu’apporterait un commerce libre, font plus de mal que l’intempérie des saisons et la rareté réelle des denrées. Les mesures administratives, qui d’ailleurs, en établissant une concurrence inégale, éloignent ces mêmes secours, ne peuvent les remplacer qu’imparfaitement. Elles ne sont utiles qu’autant que le commerce libre n’a point acquis encore une activité, une constance suffisante. Elles le sont encore, lorsque des obstacles étrangers gênent la liberté. Ainsi, bien loin qu’il faille la restreindre par des lois pour se reposer habituellement sur l’effet des mesures administratives, il faut, au contraire, chercher à l’établir pour pouvoir se passer de ces mesures si dangereuses par les erreurs que peuvent commettre ceux qui en sont chargés, par les infidélités dont ils peuvent se rendre coupables.

Ce n’est donc point par une indifférence qui serait criminelle, ce n’est point par des vues de politique commerciale, que l’assemblée nationale, en ne négligeant point des moyens dont les circonstances autorisent l’emploi, a cependant fondé sur les secours du commerce libre ses plus fermes espérances ; c’est par une conviction intime, appuyée sur la raison,