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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/604

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de la nature

rite, la nécessité et l’obligation morale de s’y soumettre, il n’en résulte, pour la majorité, ni autorité, ni pouvoir.

Les citoyens n’exercent-ils pas immédiatement ce droit ? L’ont-ils délégué ? Alors, en devenant une fonction publique de quelques hommes, doit-il changer de nature ? D’où naît alors, pour chaque citoyen, la nécessité et l’obligation morale ? De ce que la raison de la majorité a préféré cette manière de former ces règles, parce qu’elle a reconnu l’impossibilité d’y concourir elle-même. Mais en résulte-t-il un véritable pouvoir ? Non ; la majorité n’a pu donner ce qu’elle n’avait pas.

Ce corps n’a donc reçu que la fonction de chercher ce qui était raisonnable et juste, et le droit de le déclarer ; il n’a pu recevoir celui de dire : Voilà ce que la majorité de la nation croit raisonnable : un tel droit serait absurde ; la décision de ce corps ne peut donc recevoir sa force que d’une acceptation tacite ou expresse de la majorité.

Ici se présentent deux différences essentielles entre la déclaration de ce corps et le vœu immédiat de la majorité. La première, que si le vœu est immédiat, c’est la minorité seule qui fait le sacrifice de sa propre opinion à la nécessité d’obtenir des règles communes ; et que, dans la seconde manière de former ces règles, c’est la majorité, ou même l’universalité, qui fait ce sacrifice à la seule impossibilité de voter immédiatement.

L’autre différence, que ceux qui croiraient leurs droits lésés par une décision immédiate de la ma-