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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 12.djvu/296

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reté ; ne peut-elle pas influer sur les précautions qu’elle doit prendre pour sa défense ? Elle aurait donc le droit de poursuivre et de juger Louis XVI, quand bien même son inviolabilité absolue aurait été prononcée.

La royauté est abolie en France ; ce vœu de la Convention nationale est celui du peuple. Il n’a fait qu’user d’un droit inaliénable et imprescriptible. L’idée d’un contrat qui puisse lier une nation à un de ses fonctionnaires, et qu’elle n’ait pas le droit de briser, tant que ce fonctionnaire reste fidèle aux conditions du contrat, est une chimère que les ennemis de la liberté et de l’égalité des hommes osent seuls soutenir encore. Telle est l’opinion de tous les membres de cette Assemblée, et sans doute de tous les Français.

Mais elle n’est pas celle de tous les autres peuples ; et s’il en existait un où l’opinion contraire dominât, qui, pour juger légitime la déchéance de Louis XVI, eût besoin de le croire coupable, et que ce motif seul pût empêcher ceux qui le gouvernent de l’entraîner dans la cause de nos ennemis, combien alors ne deviendrait-il pas utile de constater les délits du ci-devant roi, quand bien même son inviolabilité empêcherait de le punir ? Enfin, s’il était possible que la conviction des crimes commis par Louis XVI eût influé sur le sentiment qui a fait recevoir avec transport, par les Français, le décret qui abolit la royauté, ne leur devez-vous pas de ne laisser s’élever aucun doute sur la réalité de ces mêmes crimes ? Vous serait-il permis, en ne faisant pas juger celui