il donna la forme des romans. Dans l’un, Usong,
despote vertueux et sensible, rend heureux un grand
peuple en faisant régner la justice et les mœurs.
Dans le second, le sage Alfred, souverain d’un pays
où la noblesse et le peuple ont conservé des droits
au gouvernement, perfectionne les lois, fait fleurir
le commerce, les arts et les sciences ; lient l’équilibre
d’une main juste et ferme entre les différents
intérêts, et corrige les abus en respectant les formes
établies. Le troisième est la peinture d’une
aristocratie : dans ces trois ouvrages, on voit un philosophe ami de l’humanité et de la vertu ; mais peut-être on peut leur reprocher aussi un défaut commun
à tous trois, c’est de supposer dans ceux qui gouvernent
des talents et des vertus au-dessus du
commun des hommes. Tl semble que, dans les gouvernements
où le hasard de la naissance dispose du
pouvoir, l’objet d’une bonne politique serait de
chercher au contraire quelles doivent être les meilleures
lois, en ne supposant à ceux qui commandent
que des intentions droites, et ce degré de vertu,
d’esprit, de lumières et de courage qu’on peut se
flatter de trouver dans la plupart des hommes qui
ont reçu une éducation raisonnable. Il manque à
ces ouvrages une quatrième partie, qui aurait dû
renfermer le tableau d’une démocratie parfaite ; mais
l’exécution de cette partie de son plan eut trop
exposé M. de Haller à blesser l’esprit aristocratique
de Berne. Les limites de ces États sont quelquefois
si peu distinctes, le passage de l’un à l’autre est souvent si facile ; enfin, dans les républiques
aristocra-
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ÉLOGE DE M. DE HALLER.