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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/65

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ÉLOGE DE PERRAULT.

eût le droit d’affliger ceux qui en manquaient.

Ainsi Perrault parla des satires avec un mépris bien offensant : celui d’une âme sensible et honnête, qui ne peut regarder comme innocentes des plaisanteries cruelles pour ceux qui en sont l’objet, et inutiles aux autres.

Enfin, comme Perrault était plus frappé des erreurs des anciens dans la physique que sensible à leurs beautés poétiques, il voyait le culte rendu par Despréaux à Homère ou à Pindare, du même œil que le respect des scolastiques pour les erreurs d’Aristote.

Boileau, qu’offensaient également les opinions et les discours de Perrault, devait donc le haïr. Cette haine le rendit injuste. On a oublié ses injustices contre des gens obscurs, qu’il a eu la faiblesse d’attaquer ; mais le souvenir de son injustice envers Perrault sera éternel comme la colonnade du Louvre, dont il a voulu lui dérober la gloire.

Il manquait à la capitale de la France un palais qui répondît à la grandeur de Louis XIV et à la puissance de la nation française. Louis XIV voulut qu’il fût élevé par l’architecte le plus célèbre de l’Europe. Il appela de Rome le chevalier Bernin, qui, chargé de décorer la basilique de Saint-Pierre, avait osé, avec succès, mêler ses travaux à ceux de Michel-Ange, et qui réunissait comme lui des talents rares pour tous les arts dépendants du dessin. Jamais, depuis les beaux siècles de la Grèce, aucun artiste n’avait reçu des honneurs comparables à ceux que le roi prodigua au Bernin.