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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/66

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ÉLOGE DE PERRAULT.

Son voyage n’eut pas le succès qu’on en avait attendu. Ce grand artiste avait vieilli ; son génie avait perdu ses forces, et il ne pouvait se le cacher. De là vinrent, et l’impatience avec laquelle il souffrait les contradictions, et sa répugnance à prolonger son séjour, et les louanges ridicules qu’il se donnait à lui-même. C’est parce que son génie ne l’inspirait plus, qu’il disait que c’était la Vierge qui lui avait inspiré le dessin du Louvre. On jeta, avec beaucoup de pompe, les fondements de cet édifice ; mais, quoique le dessin du Bernin eût de grandes beautés, il était bien loin de cette majesté que devait avoir le palais de Louis XIV.

Après le départ du Bernin, on voulut comparer de nouveau son dessin avec ceux des architectes français. Perrault, qui n’était point connu comme architecte, en avait donné un avant l’arrivée du Bernin ; il fut mis en concurrence avec celui de l’architecte italien, ainsi qu’un troisième, dont Dorbay, élève de le Vau, était l’auteur. Heureusement pour la gloire de notre architecture, Louis XIV, qui dans les arts avait surtout le sentiment de la grandeur, préféra le dessin de Perrault ; et ce péristyle majestueux et si simple fut élevé sur ses dessins, et avec des machines de son invention.

On reproche maintenant à Perrault [1] d’y avoir accouplé les colonnes ; mais, de son temps, on prétendait que, malgré cette disposition, l’espace de douze pieds, qu’il laissait entre les colonnes et le

  1. Ce reproche n’est pas général.