Aller au contenu

Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/225

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
213
ÉLOGE DE M. DE PRASLIN.

Il avait porté le nombre des vaisseaux de ligne en état de servir à soixante-dix ; les bois suffisants pour en construire dix autres étaient en réserve dans les arsenaux ; il y avait rassemblé les approvisionnements de toute espèce, nécessaires pour les armer ; le port de Brest avait été agrandi ; des magasins, de vastes ateliers, s’étaient élevés sur ses quais immenses ; une artillerie, pour la fonte de laquelle on avait profité des connaissances nouvellement acquises, n’exposait plus les matelots à craindre leur canon plus que celui de l’ennemi. Tout cela s’était exécuté sans exciter, de la part de l’Angleterre, une seule plainte, un seul mouvement d’inquiétude. Il est vrai qu’en France on l’ignorait également. Si M. de Praslin faisait construire un nouveau vaisseau, il lui donnait le nom d’un vieux navire hors de service. Ainsi une construction nouvelle passait pour une simple réparation. Il avait senti qu’il ne pouvait faire le bien qu’en secret ; et ce sacrifice d’une réputation passagère ne lui avait rien coûté.

Lorsque, vers la fin de 1770, la guerre menaça de s’allumer, la France se trouvait en état d’avoir, au premier ordre, vingt vaisseaux de ligne prêts à se mettre en mer ; vingt autres étaient préparés pour les suivre ; le reste devait se joindre à une escadre espagnole pour forcer l’Angleterre à tenir dans la Manche une partie de ses forces. Cette puissance n’aurait eu, dans le premier moment, que quinze vaisseaux à nous opposer ; la supériorité de la France était assurée durant la première année de