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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/433

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ÉLOGE DE FRANKLIN.


ils voyaient que ses travaux, pour assurer leur indépendance, n’étaient pas le plus grand de ses bienfaits, et qu’ils lui devaient plus que la liberté, puisque c’était par lui qu’ils étaient devenus dignes d’en jouir et de la conserver. En Angleterre, il fut pleuré par tous ceux qui ne sont esclaves, ni du ministère, ni des préjugés.

L’assemblée nationale de France lui rendit un hommage public, et eut le noble orgueil d’avouer tout ce que nous devions à l’exemple de l’Amérique, tout ce qu’une nation peut devoir au génie d’un seul homme. Par une circonstance heureuse, elle avait alors pour président un philosophe qui, comme Franklin, avait éclairé ses concitoyens sur leurs droits, avant d’être choisi pour en être le réparateur, et qui, comme lui, n’a vu dans cet honneur qu’une occasion précieuse de réaliser tout ce qu’une âme forte et un génie élevé lui ont révélé pour le bonheur des hommes [1].

L’Académie des sciences s’était empressée d’appeler dans son sein le savant qui avait arraché à la nature un de ses secrets, et détourné un de ses fléaux : elle accueillit avec transport à son arrivée le sage qui venait apprendre aux tyrans à connaître la justicé, aux hommes à ne plus dépendre que de leurs droits. Elle vit avec une douce satisfaction un de ses membres réunir la gloire d’affranchir deux mondes, d’éclairer l’Amérique et de donnera l’Europe l’exemple de la liberté. Toujours libres au mi-

  1. L’abbé Sieyès.