été à Cayenne, il fut la dupe du plan que les ministres
avaient adopté, et des administrateurs qu’ils
avaient choisis pour l’exécuter. Resté en France pour
conduire la seconde division des colons qu’on destinait
à être transférés, il apprit bientôt les désastres
de ceux qui l’avaient précédé, les manœuvres
auxquelles ces désastres étaient attribués : et il partit
pour Cayenne, non plus pour fonder une colonie
nouvelle, mais pour sauver d’une destruction totale
ce qui en restait encore, et arracher du moins à la
mort une partie de ces infortunés, qui avaient été
chercher, sous un autre ciel, la fortune ou l’oubli
de ce qu’ils avaient souffert en Europe ; enfin, pour
rapporter sur l’état de la colonie, sur les moyens de
la faire prospérer, des lumières qui pussent servir
de base à un plan mieux combiné. À son arrivée, il
fut obligé de faire arrêter l’intendant, et après quatre
mois de séjour et trois de maladie, après avoir
rétabli l’ordre et assuré aux colons, qui avaient
échappé à la famine et à l’épidémie, des vivres et
des secours, il revint en France rendre compte des
malheurs dont il avait été le témoin, et de l’impossibilité de suivre des projets trop légèrement adoptés.
L’intendant, accusé à la fois et de malversation et de négligence coupable, fut jugé et puni : la faveur des bureaux ne put le sauver ; mais ils essayèrent de se venger sur Turgot. Tout homme juste, qui exerce le pouvoir, ne peut manquer d’ennemis ; on ramassa contre lui toutes les inculpations inventées par la haine, accréditées par la malice ou par la légèreté, et on en forma un mémoire de questions, sur les-