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ÉLOGE DE TURGOT.


qu’ainsi, les corsaires de Barbarie sont les ennemis de la France, même quand, respectant ses vaisseaux, ils attaquent ceux des autres puissances ; qu’en un mot il ne peut exister, surtout pour un grand empire, d’intérêt vraiment national, qui ne se confonde pas avec l’intérêt général de l’humanité.

A ce projet, Turgot en joignit d’autres pour perfectionner l’éducation, établir une bibliothèque, former un jardin de plantes, entretenir des apothicaires éclairés, des chirurgiens habiles ; et pour encourager l’agriculture, faire fleurir le commerce dans l’île de Malte ; et du moins, une partie de ces vues pour répandre dans cette île plus d’instruction, pour y appeler plus de moyens de bonheur, a été réalisée longtemps après qu’il l’eut quittée.

L’impossibilité actuelle du bien ne doit jamais empêcher de le présenter avec confiance : ; il est bon d’accoutumer lentement les esprits à la vérité, et de les traiter comme des yeux qu’il faut amener par degrés à supporter la lumière. Les opinions se forment dans la jeunesse ; les vérités les plus utiles ne sont pas ces vérités communes déjà préparées par l’opinion, et que le vulgaire adopte à l’instant même où elles lui sont présentées, mais ces vérités, méconnues par lui, qui doivent éclairer et conduire les générations suivantes.

Après la paix de 1763, le gouvernement saisit avec ardeur le projet d’établir une colonie nouvelle dans la Guyane française, et Turgot en fut nommé gouverneur général.

Nous ne dissimulerons point ici qu’avant d’avoir