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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/511

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ÉLOGE DE L’HÔPITAL.

Il fallait donc faire juger un prince du sang par des commissaires : on avait besoin du consentement du chancelier de l’Hôpital, et l’Hôpital le donna.

Arrivé à cette époque de l’histoire de ce grand homme, j’ai senti que, s’il avait mérité le reproche qu’on lui a fait plus d’une fois sur ce consentement, il me serait impossible de continuer son éloge.

Il est des actions, ou lâches ou cruelles, que le remords n’efface point, que le bien qu’on peut faire ne répare point, parce que l’âme qui a pu en concevoir l’idée n’est plus faite pour la vertu. Sans doute, celui qui les a commises, indifférent au bien et au mal, assez habile pour faire le bien lorsque sa réputation et son intérêt le demandent, assez faible pour se prêter au mal lorsqu’il le croit nécessaire à sa fortune, peut encore être utile, il peut exécuter de grandes choses, il peut mériter des éloges et même de la gloire : mais ces honneurs consacrés à la vertu, ce culte public que tous les hommes ne doivent qu’à ceux qui savent tout sacrifier à leur conscience et au bien de la patrie, ces honneurs qui



    doute les meurtres juridiques, où le plus fort égorge le plus faible de sang-froid, sans danger et avec le fer des lois, ces meurtres sont, aux yeux de tout ce qui n’est pas indigne du nom d’homme, le plus exécrable des assassinats ; et plus le coupable est puissant, plus le crime est atroce. Gardons-nous donc de chercher à excuser ces excès, en disant que tel était l’esprit de ce malheureux siècle ; comme si le crime cessait d’être crime parce que les coupables sont en grand nombre, ou qu’ils ont étouffé leurs remords : mais rendons en même temps justice à la fidélité du parlement et à son attachement pour le sang de ses rois.