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ÉLOGE DE M. BEZOUT.


rine et des élèves du corps de l’artillerie, naquit à Nemours, le 31 mars 1730, de Pierre Bezout et d’Hélène Filz.

Le hasard lui offrit, dans le cours de ses études, quelques livres de géométrie élémentaire qui lui en inspirèrent le goût, et les éloges de Fontenelle qui lui apprirent qu’une carrière paisible et glorieuse est presque toujours le prix du talent, et même de l’amour des sciences. Son père vit avec peine des dispositions qui s’opposaient aux vues qu’il avait formées ; mais il fallut céder à un penchant devenu bientôt irrésistible.

Il ne faut pas regarder cette opposition, dont l’histoire des sciences offre tant d’exemples, même dans ce siècle, comme la suite d’un mépris pour les sciences, heureusement bien éloigné de nos mœurs actuelles. Tl est souvent difficile de distinguer si ce penchant pour l’étude, au lieu d’être l’effet ou le signe d’un véritable talent, n’est pas plutôt le fruit d’une effervescence passagère ; si même il ne sert pas de voile à un dégoût pour d’autres états, dont les commencements exigent plus de contrainte et de sacrifices : aussi un père qui sait que l’instruction et les lumières ne mènent, dans les différentes classes de la société, aux distinctions, ni à la fortune, est très-excusable de regarder comme perdu le temps qu’après ses études ordinaires son fils aurait employé à perfectionner son esprit ou sa raison, et dans cette circonstance, comme dans bien d’autres, les fautes des particuliers sont l’ouvrage des institutions publiques.