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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/566

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ÉLOGE DE L'HÔPITAL.


ter la manie des règlements, si une heureuse inconséquence ne venait l’arrêter.

Cet homme, qui voulait à la fois rétablir la magistrature dans sa dignité et dans sa gloire en y détruisant la vénalité et la corruption, rendre au clergé ses mœurs antiques en lui donnant des lumières nouvelles, maintenir la paix entre deux partis aigris et sous les armes, faire régner les lois au milieu des guerres civiles et l’humanité au sein du fanatisme ; cet homme, qui combattit seul la politique de la cour de Rome et la perfidie de Philippe II, la faiblesse de Charles IX, l’inconstance de sa mère, les intrigues du cardinal de Lorraine, les talents et la gloire du duc de Guise, l’esprit factieux des grands, l’avidité de la cour ; cet homme n’est plus le même lorsqu’il se livre à l’esprit réglementaire : ce génie si étendu, si puissant, semble se rabaisser au niveau des préjugés auxquels il s’est soumis. On a peine à croire jusqu’à quel point il a porté l’attachement à ce faux principe, qu’on ne doit abandonner à l’intérêt et aux passions des hommes que ce que les lois ne peuvent leur enlever, et quels étranges règlements le système prohibitif a inspirés à un homme d’un esprit si élevé, si conséquent. Partisans de ce système, lisez ces lois et jugez [1].

  1. Le chancelier de l’Hôpital défendit aux valets de labourage de se marier sans la permission de leurs maîtres ; tyrannique, dont tout l’effet était d’augmenter le prix des salaires de ces domestiques, puisque leurs maîtres étaient obligés d’acheter à la fois leur temps et leur liberté.

    Il régla la manière dont un laboureur devait nourrir ses char-