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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/612

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ÉLOGE DE PASCAL.

qu’animaient des intérêts particuliers ont cherché un prétexte pour justifier le mal qu’ils voulaient faire aux jésuites. Lorsque les Provinciales parurent, Descartes était le seul qui eût écrit en français d’un style à la fois naturel et noble. Pascal joignit au même mérite celui de la finesse et d’une correction dont il a été le premier, et pendant longtemps l’unique modèle. Ce qui est encore plus étonnant, c’est que dans un ouvrage de plaisanterie, sur les matières théologiques, il n’y ait peut-être pas un seul mot de mauvais goût, excepté le titre : Lettres à un Provincial. Mais ce titre est l’ouvrage de l’imprimeur, et Pascal a eu soin d’en avertir[1].

Si on osait trouver des défauts au style des Provinciales, on lui reprocherait de manquer quelquefois d’élégance et d’harmonie ; on pourrait se plaindre de trouver dans le dialogue un trop grand nombre d’expressions familières et proverbiales, qui maintenant paraissent manquer de noblesse[2]. La

  1. Dans les pensées manuscrites on trouve ce passage : « Nul ne dit courtisan que ceux qui ne le sont pas… pédant, qu’un pédant : provincial, qu’un provincial ; et je gagerais que c’est l’imprimeur qui l’a mis au titre des Lettres au Provincial.
  2. Ce jugement paraîtra peut-être trop sévère. Voici cependant quelques passages qui pourraient le justifier : « Je les viens de quitter sur cette dernière raison pour vous écrire ce récit, par où vous voyez qu’il ne s’agit d’aucun des points suivants, et qu’ils ne sont condamnés de part ni d’autre.

    « De sorte qu’il n’y a plus que le mot de prochain sans aucun sens qui court risque.

    « Mais je vois qu’elle ne fera point d’autre mal que de