faits, parce qu’alors une propriété donnée par l’expérience, ou un fait observé, y tient lieu des notions simples, des propositions évidentes par elles-mêmes, qui ne doivent plus être ni définies ni prouvées.
Si l’application de cette méthode est facile dans presque toutes les sciences naturelles, elle devient difficile dans les sciences morales, parce que la plupart des termes de celles-ci sont employés, dans l’usage ordinaire, avec un sens vague et confus, et qu’il faut, après en avoir fixé le sens, veiller toujours à ce qu’il n’arrive jamais de les employer dans le sens vulgaire. Mais il est temps de venir à ce qui a mérité à Pascal le nom de philosophe, et augmenté encore la réputation de l’écrivain des Provinciales, je veux dire à ses Pensées sur l’homme.
Pascal croyait que les preuves de l’existence de Dieu, tirées des considérations métaphysiques, ne donnent de l’Être suprême qu’une connaissance inutile à la morale. Il croyait que les preuves que l’on déduit de l’ordre du monde, quelque imposantes qu’elles soient par elles-mêmes, quelque force qu’elles aient sur les bons esprits, ne sont pas suffisantes contre des athées endurcis, qui peuvent y opposer avec quelque avantage et le désordre apparent du monde, et ces phénomènes dont l’ordre ou le désordre nous échappe, et dont le nombre est immense, eu égard au petit nombre d’objets dans lesquels l’ordre a pu nous frapper. Pascal ne se flattait pas de pouvoir résoudre ces difficultés ; et l’eût-il pu, il ne s’en fût pas occupé : ce n’aurait été que livrer aux disputes des gens instruits et des philoso-