CONDORCET. Selon Platon, les bonnes lois sont
celles que les citoyens aiment plus que leur vie ; l’art
de faire aimer aux hommes les lois de leur patrie
était, selon lui, le grand art des législateurs. Il y a
loin d’un philosophe d’Athènes à un philosophe du
faubourg Saint-Jacques.
PASCAL. « Le plus sage des législateurs disait que, pour
le bien des hommes, il faut souvent les piper, et un autre bon politique, cum veritatem qua liberetur ignoret, expedit quod fallatur. Il ne faut pas qu’il sente la vérité de l’usurpation.
Elle a été établie autrefois sans raison ; elle est
devenue raisonnable. Il faut la faire regarder comme authentique, éternelle, en cacher le commencement, si on ne veut qu’elle prenne bientôt fin. » (P. 293.)
CONDORCET. On ne manquera pas d’accuser l’éditeur,
qui a rassemblé ces pensées éparses, d’être
un athée, ennemi de toute morale ; mais je prie les
auteurs de cette objection de considérer que ces
pensées sont de Pascal, et non pas de moi ; qu’il les
a écrites en toutes lettres ; que, si elles sont d’un
athée, c’est Pascal qui était athée, et non pas moi ;
qu’enfin, puisque Pascal est mort, ce serait peine
perdue que de le calomnier.
Il est beau de voir, dans cet article, M. de Voltaire prendre, contre Pascal, la défense de l’existence de Dieu ; mais que diront ceux à qui il en coûte tant pour convenir qu’un vivant puisse avoir raison contre un mort ?
PASCAL. « Jamais on ne fait le mal si pleinement et si