Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/335

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tration domestique ; qu’il se livre aux travaux nécessaires pour se rendre plus digne des fonctions auxquelles il peut être appelé, ou qu’il se contente d’examiner, de suivre, soit les projets proposés pour l’utilité commune, soit les opérations des divers pouvoirs établis par le peuple ; que son goût le porte à ne travailler qu’à perfectionner sa raison, a remplir par des plaisirs dignes d’un être pensant le vide de sa vie, je le vois s’entourer de livres, chercher à connaître les hommes éclairés, rassembler autour de lui les productions les plus curieuses et les plus utiles du pays qu’il habite, vouloir connaître quelles vérités ont répandu un jour plus égal et plus pur sur les ombres qui nous environnent encore, quelles nouvelles applications des sciences en ont agrandi l’utilité, quelles inventions ont ajouté à la perfection des arts, quel avantage local il peut en retirer, quel esprit influe sur la composition des lois ou préside aux opérations du gouvernement, vers quel but marche la puissance publique, quels principes la guident, ou quels intérêts menacent de la corrompre.

Or, ce que cet homme éclairé, actif, animé du désir de savoir ou du besoin de penser, ferait pour lui-même, l’instruction publique préparée aux hommes doit le faire pour tous. Elle doit offrir un guide et un appui à celui qui manque de lumières ou de force pour avancer seul dans la carrière, rapprocher les moyens de s’instruire de celui que la nécessité en retient éloigné, les faciliter pour celui dont l’activité languissante ou la faible raison se rebuterait des premières difficultés. Au milieu du choc des