Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/366

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aient amené de nouvelles méthodes, il est bon de connaître celles qui les ont précédées, de pouvoir y observer la marche du génie, de le voir aux prises avec les difficultés dont nous nous jouons aujourd’hui.

Une autre entreprise non moins digne d’encouragement serait la traduction de tous les livres un peu importants qui paraissent dans les diverses langues de l’Europe sur les sciences, sur la politique, la morale, la philosophie, les arts, l’histoire, les antiquités. Par ce moyen, chaque nation tout entière profiterait des progrès de tous les peuples : une communication de lumières presque instantanée s’établirait entre eux, et la France qui en serait le foyer en retirerait les principaux avantages. Ses grands écrivains ont rendu la langue française celle de tous les hommes éclairés de l’Europe ; déjà plusieurs nations ont adopté les formes plus simples, plus méthodiques de nos phrases, en sorte que leurs langues ne diffèrent presque plus de la nôtre que parce qu’elles emploient des mots différents et différemment modifiés. Or, si la connaissance du français ajoutait au plaisir de pouvoir lire nos bons ouvrages, l’utilité de trouver dans nos traductions tout ce qui dans les autres langues mériterait d’être connu presque au moment où ceux qui les entendent peuvent en profiter, elle obtiendrait bientôt l’honneur de devenir véritablement une langue universelle. Et de quelle utilité ne nous serait pas cet avantage ! Aujourd’hui aucune autre nation ne pourrait ni nous le disputer, ni nous empêcher de nous en saisir. Deux seulement