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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 8.djvu/56

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l’influence de la révolution

marchandises étrangères qui vinrent inonder ce pays, aussitôt que la paix fut conclue, et les payements sans nombre, faits aux créanciers anglais pour des dettes antérieures à la guerre, l’épuisèrent d’argent comptant. L’impossibilité de payer les impositions ayant duré plusieurs années, les avait accumulées plus ou moins suivant les circonstances, et les besoins publics forcèrent le gouvernement à les exiger avec rigueur. Dans quelques comtés, où les contraintes du gouvernement et celles des créanciers faisaient le plus de sensation, quelques gens mal intentionnés, ou plutôt inspirés par le désespoir, cherchèrent à profiter des circonstances à la faveur du désordre. Ils avaient à leur tête un ancien sergent-major de notre armée, nommé Shayes.

Leur première démarche fut de convoquer les citoyens, dont les plus sensés et les plus sages se tinrent chez eux. Dans ces assemblées, on convint de faire fermer les tribunaux, de faire suspendre la levée des impositions, de mettre en circulation du papier-monnaie, et de changer en partie le gouvernement. Toutes ces propositions paraissaient populaires. L’inaction des tribunaux laissait les débiteurs en paix. L’émission du papier offrait la perspective de payer les dettes sans se gêner, et les changements qu’on se proposait de faire dans le gouvernement avaient pour objet d’en diminuer la dépense, qui, d’ailleurs, est très-faible.

Comme ces hommes n’avaient aucun espoir de gagner la pluralité des suffrages, et par là de pouvoir agir légalement, ils usèrent de violence. Ils mar-