Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 9.djvu/16

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légitime d’agir contre ce qu’il croit raisonnaible et utile.

Ainsi, lorsque je soumets ma volonté à une loi que je n’approuve pas, je n’agis point véritablement contre ma raison, mais je lui obéis ; parce qu’elle me dit que dans cette action, ce n’est pas ma raison particulière qui doit me guider, mais une règle commune à tous, et à laquelle tous doivent être soumis. Ainsi, la loi n’exige réellement aucun sacrifice de la raison ou de la liberté de ceux même qui ne l’approuvent pas. Elle ne devient une atteinte à la liberté, que lorsqu’elle s’étend au delà des objets qui, par leur nature, doivent être assujettis à une règle générale.

Il y a deux parties bien distinctes dans toute législation : décider quels sont les objets sur lesquels on peut légitimement faire des lois ; décider quelles doivent êtie ces lois.

Si tous les hommes ne s’accordaient pas sur ce qui doit être l’objet des lois, si cette détermination n’était pas susceptible d’être établie sur des principes vraiment démontrés, il deviendrait alors raisonnable et juste de décider encore cette question à la pluralité. Mais il en résulterait dans l’ordre de la société quelque chose d’arbitraire, et une institution qui ne serait juste que parce qu’elle serait nécessaire.

Si, au contraire, comme je le crois, la détermination de ce qui doit être l’objet des lois est susceptible de preuves rigoureuses, dès lors il ne reste plus rien d’arbitraire dans l’ordre des sociétés.

Une loi est donc proprement une déclaration que