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Page:Condorcet - Réflexions sur l’esclavage des nègres, 1781.djvu/37

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sur l’esclavage des Negres

raiſon en eſt ſimple, ils n’ont pas diſtingué le produit réel du produit net. En effet, faites cultiver par des eſclaves, le produit net ſera plus grand, parce qu’il ne vous en coutera, en frais de culture, que le moins qu’il eſt poſſible. Vous ne donnerez à vos eſclaves que la nourriture néceſſaire, vous choisirez la plus commune & la moins chere, ils n’auront qu’une hutte pour maison, à peine leur donnerez-vous un habillement groſſier. Le journalier le plus preſſé d’ouvrage exigeroit un ſalaire plus fort. D’ailleurs, un journalier veut tantôt gagner plus, pour former quelque capital, tantôt il veut ſe reſerver du tems pour ſe divertir ; s’il emploie toutes ſes forces, il faut que votre argent le dédommage de ce qu’il n’a pas ſuccombé à ſa pareſſe. Avec les eſclaves vous employez les coups de bâton, ce qui eſt moins cher. Dans la culture libre, c’eſt la concurrence réciproque des propriétaires & des ouvriers qui fixe le prix. Dans la culture eſclave, le prix dépend abſolument de l’avidité du propriétaire. Mais auſſi, dans la culture eſclave, le produit brut eſt plus foible ; & au contraire, le produit brut ſera plus conſiderable dans la