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Page:Condorcet - Réflexions sur les affaires publiques par une société de citoyens.pdf/39

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les ſiens. Mais ici ce ſont les Électeurs eux-mêmes qui ſe déclarant ennemis des droits des hommes, ne peuvent être préſumés devoir choiſir des hommes déterminés à les défendre.

La demande des Planteurs renferme de plus des prétentions injuſtes, qui ne permettent pas de l’admettre. D’abord, il eſt abſurde que ces Planteurs croyent pouvoir repréſenter leurs eſclaves, & veuillent proportionner le nombre de leurs Députés à celui de ces eſclaves. On ne repréſente que ceux par qui on a été choiſi ; on ne repréſente que ceux avec qui l’on a des intérêts communs. Et qui pourroit admettre l’idée ſcandaleuſe de repréſenter ceux qu’on opprime, ceux que par la violence on a privés de leurs droits, ceux à qui on veut empêcher la Nation de rendre juſtice ? Les Repréſentans de Saint-Domingue ne devroient donc repréſenter que des blancs ; on ne pourroit leur accorder plus d’un ou de deux Députés, au lieu de vingt-un, ſans ſe rendre coupable d’une condeſcendance pour la richeſſe qui déshonoreroit la Nation.

Mais, de plus, eſt-il juſte d’admettre comme Repréſentans d’un pays, des Députés qui n’ont été élus que par une partie des Citoyens de ce pays ? Or, les noirs libres n’ont pas été