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Page:Condorcet - Réflexions sur les affaires publiques par une société de citoyens.pdf/41

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appelés à l’élection des Députés, les Planteurs ne propoſent pas de les convoquer ; donc les Députés des Colonies ne peuvent être admis, puiſqu’ils ne ſont pas les Repreſentans de ces nouvelles Provinces, mais ſeulement les agens d’une claſſe de Citoyens.

On dira ſans doute que les Colonies doivent avoir des Repréſentans ; que leur droit cet égard dérive du droit naturel qu’a tout homme, de n’être ſoumis qu’aux Loix à la formation deſquelles il a contribué. Nous répondrons que tout homme qui viole dans l’inſtant même un des droits naturels de l’humanité, perd celui d’invoquer ce droit en ſa faveur.

Les Planteurs peuvent-ils dire : aucun homme ne doit être obligé d’obéir aux Loix auxquelles il n’a pas contribué, tant qu’ils voudront que les noirs eſclaves, & même les noirs libres, obéiſſent à des Loix auxquelles les noirs n’ont pas contribué ? La privation du droit de cité dont ils le plaindroient, n’eſt-elle pas une moindre injure au droit naturel que l’eſclavage qu’ils prétendent maintenir ? Enfin, la France ne commettroit-elle pas une moindre injuſtice en ſoumettant les Planteurs à des Loix faites par les François, qu’en ſoumettant les noirs à