Page:Condorcet Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
(10)

dans l’oubli, observèrent que tous les mots d’une langue n’étoient que les combinaisons d’une quantité très-limitée d’articulations premières ; que le nombre de celles-ci, quoique très-borné, suffisoit pour former un nombre presque infini de combinaisons diverses. Ils imaginèrent de désigner, par des signes visibles, non les idées ou les mots qui y répondent, mais ces élémens simples dont les mots sont composés.

Dès-lors, l’écriture alphabétique fut connue ; un petit nombre de signes suffit pour tout écrire, comme un petit nombre de sons suffisoit pour tout dire. La langue écrite fut la même que la langue parlée ; on n’eut besoin que de savoir reconnoître et former ces signes peu nombreux, et ce dernier pas assura pour jamais les progrès de l’espèce humaine.

Peut-être seroit-il utile aujourd’hui d’instituer une langue écrite qui, réservée uniquement pour les sciences, n’exprimant que ces combinaisons d’idées simples, qui sont exactement les mêmes dans tous les esprits, n’étant employée que pour