Page:Conférences inédites de l'Académie royale de peinture et de sculpture.djvu/99

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il n’y aurait point de peintre ni de peinture, car nous venons de voir que c’est le dessin qui lui commande et qui en fait tout l’éclat et toute la gloire.

Et si nous nous en rapportons à ce que les anciens nous ont dit de l’origine de la peinture, nous verrons que ce ne fut pas avec de la couleur qu’elle fut trouvée ; car l’on dit que la bergère qui fit le portrait de son amant n’avait pour couleur et pour pinceau qu’un poinçon, ou tout au plus un crayon, avec lequel elle traça l’image de celui qu’elle aimait, et néanmoins toute l’antiquité n’a pas laissé de nommer ce premier portrait l’origine de la peinture, quoique l’ouvrière n’eût employé aucune couleur pour le faire.

Il est donc aisé de conclure que ce n’est pas la couleur qui fait le peintre ni le tableau ; mais je demeure d’acccord qu’elle contribue et aide à lui donner la dernière perfection, de même que la beauté du teint achève de donner la perfection aux beaux traits du visage.

Car assurément le peintre ne peut être parfait qui ne sache bien appliquer les couleurs, ni un tableau ne saurait être accompli en toutes parties que la couleur n’y soit employée doctement et avec économie. Mais je dirai aussi que cette doctrine et cette économie viennent du dessin, et qu’en un mot tout l’apanage de la couleur est de satisfaire les yeux, au lieu que le dessin satisfait l’esprit.