Page:Conon de Béthune - Chansons, éd. Wallensköld, 1921.djvu/21

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3. -iee : -ie. Les chansons I, IV, VI, VII et X ne présentent que des rimes pures en -ie[1]

4. -eine : -aine. Rime mêlée dans VIII (v. 5 : paine < p œ n a : -aine).[2]

5. Le pronom ceaus (e c c e - i 11 o s) : -aus dans VIII (v. 17). Dans les chansons qui sont, selon toute probabilité, de Conon de Béthune, il y a, en outre, à la rime quelques formes qui attestent l'absence de certains traits picards prononcés : lieus (et non lius) : -eus IV, 45 ; entière, manière (et non entire, manire) : -iere, VII, 2 et 10.[3]

La mesure du vers nous atteste aussi quelques traits « picards » dans les chansons d’attribution certaine : 1° la désinence monosyllabique -iés de la 2e pers. du plur. de l’imparf. de l’ind. et du cond. (V, 19 : sériés ; X, 22 : sariés ; X, 44 : estiés)[4] ; 2° la forme abrégée de l’adjectif possessif de la 1ère pers. du plur. no (IV, 45 et 48), à côté de nombreuses formes non abrégées[5] .

Conon de Béthune s’est donc servi, dans ses chansons, d’un langage qui tenait le milieu entre le francien et le dialecte picard prononcé, donc probablement l'artésien, mitigé peut-être par des traits franciens. Les chansons R. 15, 1859 et 1960, dont les rimes et la mesure attestent des traits de langue divergents, ne peuvent donc pas lui appartenir ; ainsi se trouvent confirmées les indications fournies par les

  1. Il en est de même de R. 15 et R. 1960, mais R. 1859 mêle les deux finales (v. 55 : atachie : envie, etc.). R. 15 fait, par contre, rimer le parfait en -ut avec le part, passé en -u (v. 18 : connut : -u), trait caractéristique du picard.
  2. Cette rime se trouve aussi dans des textes franciens.
  3. R. 15 fait rimer au cas-sujet coraige (v. I) avec -aige.
  4. Le classement des mss. permettrait cependant aussi les formes sariés et estiés.
  5. Le classement des mss. permettrait, à la rigueur, d’admettre une altération de la leçon primitive. — La chanson R. 1859 présente deux traits inconnus aux pièces attribuables à Conon : chute de e en hiatus (v. 15 : ramentu pour ramenteû) et contraction de ne la en nel (v. 42).