Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/34

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rait dans le voisinage comme « tout-à-fait supérieure ». L’unique secret de sa vie était la honteuse terreur du jour où son mari rentrerait à la maison et y habiterait pour de bon. Sous ce même toit vivaient également sa fille Lydia, et son fils Tom. Tous deux ne connaissaient que très peu leur père. Le capitaine n’était pour eux guère plus qu’un visiteur rare et privilégié qui, le soir, fumait sa pipe dans la salle à manger et qui restait à coucher. Lydia, fillette languissante, était plutôt choquée par ses façons ; quant à Tom, à la manière des jeunes garçons, il manifestait une complète indifférence, franche, naturelle et charmante.

Et douze fois par an, le capitaine Mac Whirr correspondait ainsi, du fond des mers de Chine, demandant qu’on le rappelât « au souvenir de ses enfants » et signant « ton mari qui t’aime » avec un calme parfait, comme si ces mots usés déjà par tant de générations eussent perdu leur signification et ne dussent plus servir que pour la forme.

Les mers de Chine, du nord au sud, sont