Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/121

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l’avons dit dans le premier chapitre de ce roman, le sire de Coninck avait perdu un œil, et cette perte rendait sa physionomie peu agréable au premier abord. Sa pâleur extrême, ses joues osseuses, les rides qui creusaient son front, donnaient à son visage une expression austère et méditative. D’ordinaire on ne remarquait rien en lui qui pût le distinguer des autres hommes ; mais, dès qu’une pensée l’inquiétait, dès qu’un projet ou même une chose futile l’intéressait plus particulièrement, son regard s’animait et prenait une vivacité inaccoutumée : des éclairs d’intelligente et virile énergie jaillissaient de son œil unique, et toute sa personne apparaissait fière et imposante. À son entrée, il promena sur les personnes qui se trouvaient dans la chambre un regard défiant comme celui d’un renard, et examina plus particulièrement maître Rogaert, chez lequel il remarqua plus de finesse que chez les autres.

— Maître de Coninck, dit Adolphe, en s’adressant à lui, veuillez vous approcher ; j’ai à vous demander un service que, j’espère vous ne me refuserez point, si l’espoir que je mets en vous est fondé ! Mais, avant tout, il faut que vous me promettiez de ne révéler à personne le secret que je vais vous confier.

— L’équité et les bienfaits du sire de Nieuwland ne sont point encore oubliés parmi les tisserands, répondit de Coninck ; aussi je jure à votre seigneurie qu’elle peut compter sur moi, comme sur un serviteur