Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/188

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— Le premier d’entre vous qui ose encore parler de se rendre, je le foule aux pieds comme un traître, s’écria-t-il. J’aime mieux mourir sur le cadavre d’un ennemi que garder une vie déshonorée. Croyez-vous donc que mes bouchers tremblent en face du danger ? Non. Voyez comme leur cœur bat, comme ils aspirent ardemment à la lutte ! Ils ne comprennent pas votre langage, et ils sont prêts à mourir ! Oh ! je vous le déclare, nous défendrons la ville de nos pères, et que celui qui a peur s’en aille au logis et se cache auprès des femmes et des enfants. Mais je vous le jure par cette hache, la main qui ouvrira la porte ne se relèvera jamais !

La rage au cœur, il courut alors vers ses bouchers et parcourut leurs rangs d’un pas rapide.

— Rendre la ville ! Nous, rendre la ville ! répétait-il à mainte reprise, avec une expression de colère et de mépris.

Quelques-uns des chefs des métiers, en entendant ces exclamations, lui demandèrent ce qu’il voulait dire ; alors Breydel éclata :

— Que le ciel nous soit en aide, braves gens ! Le sang bout dans mes veines de me voir cloué à cette place ! Les tisserands veulent rendre la ville ! Mais, je vous en conjure, mes frères, demeurez avec moi, et mourons comme de vrais Flamands ! Regardez ce sol que foulent vos pieds, c’est là que sont morts les bouchers, nos pères ! dites, que là aussi seront nos tombeaux : oui, que chacun le dise, ici sera ma