Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/250

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son couteau, Leroux jeta son épée et se tourna vers ses camarades en disant :

— Ah çà ! quoiqu’il arrive, je ne veux pas qu’on m’aide. La lutte doit être loyale ; car mon ennemi est un brave Flamand.

— Êtes-vous prêt ? s’écria Breydel.

— Je suis prêt !

À ces mots les deux champions rentrèrent leurs têtes entre les épaules, et leurs yeux flamboyèrent sous leurs paupières baissées ; leurs dents et leurs lèvres se serrèrent avec violence ; alors ils se ruèrent l’un sur l’autre comme deux taureaux furieux. Un pesant coup de poing s’abattit de chaque côté sur une poitrine, comme un marteau sur une enclume, et les deux lutteurs plièrent sur leurs jarrets ; mais leur rage s’en accrut davantage. Un sombre mugissement sortait avec bruit de leur gorge, leurs bras s’enlaçaient autour de leurs corps comme deux ceintures de fer ; leurs bras et leurs jambes semblaient animés d’une force extraordinaire ; tous leurs membres se tordaient affreusement l’un contre l’autre, et les terribles étreintes leur arrachaient des soupirs de douleur. Le feu de la rage montait à leurs visages enflammés, et le blanc de leurs yeux était veiné de lignes rouges. Cependant, aucun des deux ne put ébranler l’autre ; on eut dit que leurs pieds s’étaient enracinés dans la terre où ils s’enfonçaient. Les veines de Breydel se tordaient comme des cordes sur