Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/282

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traordinaire, Breydel demanda à maints fuyards où ils allaient et pourquoi ils abandonnaient ainsi leur ville ; les exclamations plaintives des femmes ne pouvaient lui expliquer cette énigme.

— Ô maître ! s’écria l’un, les Français veulent nous brûler vivants ! Nous fuyons une mort cruelle !

— Ô maître Breydel, disait un autre avec plus de douleur, sur votre vie n’allez pas à Bruges, car il y a une potence pour vous devant la porte des Forgerons ?

Quand le doyen voulait faire une seconde question pour se faire expliquer l’affaire, une voix plus puissante, pareille au hurlement d’un loup, s’éleva au-dessus de la foule et cria :

— En avant ! en avant, malheureux ! les cavaliers français nous poursuivent !

Alors chacun se jeta en avant avec désespoir, et les têtes de la multitude passèrent avec une rapidité incroyable dans les ténèbres. On entendit des voix plaintives s’écrier tout à coup :

— Malheur ! malheur ! Ils brûlent notre ville… Voyez, les flammes s’élèvent au-dessus de nos toits Ô malheur ! malheur !

Breydel, qui s’était arrêté, se retourna vers la ville et aperçut des tourbillons de flammes et une fumée rouge au-dessus des remparts. La douleur et la rage lui déchiraient le cœur ; il s’écria en montrant la ville :

— Ô hommes, y a-t-il parmi vous quelqu’un assez