Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/289

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commande. Mais nous qui agissons sans ordres, de notre propre chef, nous sommes aussi responsables devant Dieu et devant les hommes de nos actions ; le sang versé par nous retombe sur notre tête.

Une colère ardente agita le doyen des bouchers. La déclaration de de Coninck lui pesait sur le cœur.

— Mais, maître, répliqua-t-il, vous paraissez avoir des remords ; ce serait honteux. N’avons-nous pas défendu nos corps et nos biens, et l’amour pour notre seigneur légitime le Lion, ne nous y a-t-il pas guidés ? Je me déclare pur de tout crime ; et j’espère bien que ma hache n’a pas vu sa dernière victime. Si tenté que je sois parfois de blâmer votre incompréhensible conduite, je n’ose cependant pas le faire ; car vos voies sont plus secrètes que le sort d’une âme qui sort de ce monde.

— Vous pensez bien qu’il se cache quelque chose là-dessous, et c’est là le nœud que je vais délier pour vous. Vous avez toujours cru, maître Jean, que j’étais trop patient et trop lent ; mais écoutez ce que je faisais, pendant que, par vengeance, vous faisiez couler inutilement le sang de nos ennemis. J’ai fait connaître secrètement au comte Guy nos efforts pour la liberté de la patrie, et il les a sanctionnés de son approbation souveraine. Maintenant nous ne sommes plus des mutins, mon ami. Maintenant nous sommes les lieutenants légitimes de notre suzerain.

— Merci, ô maître, cria Breydel en extase, main-