Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/288

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rester libre et indépendante aussi longtemps que les autres villes du pays vivant sous le joug des étrangers ; car nos ennemis demeurent constamment dans nos remparts. Le mot patrie s’entend aussi bien du moindre village que de notre ville de Bruges. Les fers de la domination française, nous ne pouvons les briser qu’avec le secours des autres villes de la Flandre, puisqu’il y a des ennemis dans chaque lieu où il serait important de ravir la liberté reconquise. Vous avez certainement aussi pensé à cela, mais dans votre fougue virile vous franchissez tous les obstacles, sans les écarter de votre route. Une chose plus importante vous a échappé ; vous plaît-il de me répondre à cette demande : Qui nous donne le droit d’assassiner et d’incendier ? Qui a légitimé en nous ces crimes qui, sur la terre, sont punis de mort et dans l’autre monde de damnation ?

Breydel regarda le doyen des tisserands d’un œil mécontent, et repartit :

— Mais, maître, je crois que vous cherchez à m’égarer par vos beaux discours. Qui nous donne le droit d’assassiner et d’incendier ! qui donne ce droit aux Français, dites ?

— Qui ? leur roi, Philippe le Bel et leur général en chef de Châtillon. Les souverains portent aussi sur leur tête couronnée la récompense et la peine de leurs bons et de leurs injustes ordres. Par la fidélité et l’obéissance, un sujet ne peut pas mal faire. Le sang versé témoigne contre le maître qui