Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/312

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Il s’approcha de son frère, et l’entraîna hors de la salle.

— Mon frère, dit-il, il convient qu’on ne laisse pas sans récompense un dévouement comme celui des deux doyens de notre bonne ville de Bruges ; je vous donne, en conséquence, le pouvoir nécessaire à l’accomplissement de ce vœu ; quand vous serez sur le champ de bataille, au milieu des métiers, ma volonté est que vous fassiez de Coninck et Breydel chevaliers en présence de tous leurs compagnons ; que l’amour de la patrie soit anobli ainsi en eux. Renfermez cet ordre comme un secret dans votre cœur jusqu’à ce qu’il soit temps : maintenant, rentrons, car il faut que je vous quitte tous.

Robert s’approcha de sa fille, prit sa main dans la sienne et dit :

— Mon enfant, tu sais comment j’ai quitté ma prison, un généreux chevalier expose ses jours pour moi dans un cachot. Ne t’attriste pas, Mathilde ; soumets-toi avec moi aux rigueurs du sort…

Mathilde l’interrompit :

— Oh ! je sais quel mot douloureux vous avez sur les lèvres : vous devez me quitter…

— Tu l’as dit, ma noble enfant, je dois retourner dans mon cachot : j’ai promis sur mon honneur que je ne resterais qu’un jour en Flandre. Ne pleure pas ! la fatalité ne nous poursuivra pas longtemps.

— Je ne pleurerai pas, ce serait de l’ingratitude. Je rends grâces au Seigneur qui m’a donné tant de