Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/338

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lées, une vieille mère aux cheveux blancs, les mains jointes et les yeux levés au ciel, et une jeune fille éperdue et les cheveux épars. Celle-ci, saisie d’effroi, cachait son visage dans les vêtements de sa mère qu’elle serrait dans ses bras d’une étreinte fébrile ; dans cette attitude, elle restait immobile et comme inanimée : elle n’avait pas un soupir, pas une plainte.

Quand les soudards furent revenus de leur première stupéfaction, ils s’approchèrent brutalement de ces infortunées et se répandirent en injures contre elles ; ils allaient porter les mains sur elles, car l’enfant qui leur servait de défenseur ne leur inspirait aucun effroi. Quelle ne fut pas leur rage quand le jeune boucher porta le pied en arrière, et, dans cette attitude plus ferme, fit tournoyer sa hache et les fit reculer épouvantés ! Un instant ils suspendirent leur criminelle agression, jusqu’à ce que l’un d’eux s’élança sur l’enfant pour le percer de son épée ; mais le boucher détourna l’arme de l’ennemi et asséna sur l’épaule de celui-ci un coup de hache avec l’énergie du désespoir. L’agresseur recula en chancelant et tomba dans les bras de ses compagnons. Comme si ce coup eût épuisé les forces du jeune homme, il s’affaissa sur le sol et resta immobile à côté des femmes. Les soudards s’étaient groupés sur-le-champ autour de leur compagnon blessé, et lui ôtèrent ses vêtements, en proférant d’affreuses menaces et d’horribles imprécations. Pendant ce temps, la