Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/341

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— Vous pouvez entreprendre ensemble le grand voyage, engeance flamande !

La mère poussa un dernier cri d’angoisse, s’élança en avant et s’affaissa lourdement sur le corps de sa fille.

Cette scène déchirante dura moins de temps qu’il n’en a fallu pour la raconter. Tout cela se passa en quelques instants, si bien que les soudards étaient encore occupés à ramasser les joyaux éparpillés, que déjà la mère et la fille avaient quitté cette terre pour un monde meilleur.

Dès que les pillards étrangers eurent emporté du grenier tout ce qui avait quelque valeur, ils quittèrent la maison pour aller reprendre ailleurs leur œuvre de dévastation. Les malheureux habitants, qui étaient chassés de leurs demeures ou n’osaient plus y rester, erraient, comme perdus, dans les rues, et se trouvaient en butte aux plus brutales insultes de la part des étrangers. Combien ne devaient pas être douloureux ce désespoir et cette impuissance pour ces cœurs flamands ! Avec quelle amertume et quelle haine ne maudissaient-ils pas le nom français !

Vers midi, un grand nombre de cavaliers parcoururent les rues pour rappeler les soudards, car messire de Châtillon avait jugé que la couronne de France était suffisamment vengée. On proclama que les cadavres devaient être inhumés, et que chacun eût à regagner sa demeure.

Quelques klauwaerts, qui s’étaient rendus chez