Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/368

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me trouverais sous la bannière du suzerain et non dans ma demeure, et, si je meurs, ce sera l’épée au poing. Mais je crois que cela n’irait pas aussi loin, car l’émeute serait bientôt étouffée. Quant à vous, doyen, hâtez-vous de quitter le pays, je vous le conseille en ami.

— Non, messire, je ne quitte pas mon pays : les os de mes pères reposent dans cette terre. Je vous en prie encore une fois, songez que tout est possible et que le sang français peut être versé par nous ; alors vous vous ressouviendrez de mes paroles : c’est tout ce que j’avais à dire à votre seigneurie. Adieu, messire, que Dieu vous protége !

De Mortenay pesa plus attentivement les paroles du doyen des tisserands et découvrit, à sa grande tristesse, qu’il s’y cachait un secret terrible : aussi résolut-il d’engager le lendemain messire de Châtillon à redoubler de vigilance et d’ordonner lui-même certaines mesures pour la sûreté de la ville ; sans se douter que ce qu’il redoutait allait s’accomplir sitôt, il se mit au lit et s’endormit d’un calme sommeil.